Le soleil s’est levé et la réalité s’est installée.

« Tu sais, il m’arrive parfois de rêver que je vole. Je commence par courir très très très vite, comme si j’étais surhumaine. Et le terrain devient de plus en plus rocailleux et pentu. A la fin je cours si vite que mes pieds touchent même plus le sol. Et je flotte. C’est fantastique comme sensation. Fantastique. J’suis libre, en sécurité. Et puis je me rends compte que je suis complètement seule. Et après je me réveille. - RAIN BIRD »

Le soleil éclairait mon visage, tandis que le vent lui, le fouettait. Je restais là, assise sur ce gros rocher, au bord de l'eau, m'évadant dans mes pensées. Cela faisait un bon moment que je n'avais pas pris la peine de rester seule et de réfléchir à mon avenir, sur moi-même. Levant la tête je regardais cette lumière, à l'horizon, m'aveuglant comme jamais. La mer était calme. Pas une seule vague ni de personne aux alentours. C'était mon coin à moi. D'ailleurs, depuis toute petite j'aimais me rendre ici pour m'amuser à regarder comment les roches étaient faites. Passionnant je sais, mais j'étais le genre de personne à être très concentrée sur ses études avec une curiosité débordante, donc ce genre de choses m'amusaient beaucoup. Mais récemment, je partageais mon trésor avec une autre personne. Une amie plus exactement. Je sais, ça pouvait paraître dingue. Surtout que je m'étais promise de ne plus m'attacher aux gens, mais avec elle, c'était différent. Jaleeya était mon parfait opposé. Elle était tout le temps souriante, amusante et pleine de vie. Alors que moi, j'étais froide, sérieuse, et égoïste. Comme on dit, c'était mon petit rayon de soleil qui illuminait ma journée. Grâce à elle, je changeais. J'avais beau me montrer réticente, mais rien. Pas une seule fois elle ne pouvait prendre mal mes petites remarques. Ou alors, elle le cachait très bien. En tout cas, tout ça était fini. Jaleeya était sûrement la personne en qui j'avais le plus confiance. Regardant les vagues, celle-ci commençaient enfin à s'agiter. L'eau était tellement belle de ce côté-ci. Souriant devant une telle beauté, je me mis à rire. Toute seule. Cela me rappelait la douceur des vagues dans mes cheveux quand, il y a quelques mois, j'étais tombée dedans. Ce qui était assez probable vu ma maladresse. Je m'étais rendue à cet endroit précis pour pouvoir étudier en paix, sauf que cette fois-là je n'étais pas seule. Plongée dans mes ouvrages, je ne prêtais pas attention à ce qui pouvait m'entourer. D'ailleurs, je n'avais même pas entendu les échos des pas de Jaleeya. Surprise de voir son reflet dans la mer et prise de panique, j'avais glissé de mon rocher, tombant dans l'eau. Gros fou rire de son côté et du mien, même si au début, j'étais assez choquée de sa réaction. Remontant à la surface, je m'étais assise près de cette inconnue commençant à parler de tout et n'importe quoi. C'était la première fois que j'entamais la conversation. D'habitude, les gens venaient à moi, enfin le peu de gens qui avaient le courage de m'affronter. Et comme toujours, je ne manquais pas de les rejeter. Reprenant mes esprits, je sortis mon portable, prévenant mon amie où je me trouvais pour qu'elle me rejoigne le plus vite possible. J'avais tellement hâte de la revoir. Ensemble, il nous arrivait toutes sortes de choses délirantes et loufoques. Un pot de fleur pouvait carrément devenir une arme pour nous. Une nouvelle fois, mes yeux se posèrent sur la mer. Regardant de droite à gauche, je ne voyais encore personne. Je sortis alors un carnet de dessin, puis me mis à dessiner. On dit souvent que dessiner pouvait vraiment être calmant et passionnant. Regardant l'horizon, mes mains bougèrent toues seules, jusqu'au résultat final. Médiocre. On aurait dit celui d'un enfant de maternelle. Les oiseaux ressemblaient à des vagues, les vagues à des cheveux et le soleil, bah le traditionnelle, rond avec des traits sur tous les côtés. C'était certain, je n'avais pas de don pour l'art. Arrachant la feuille, je la chiffonna puis la fourra dans mon sac, suivit des ustensiles. Regardant ma montre, je m'impatientais légèrement, ne voyant toujours pas Jaleeya. Certaines personnes se seraient déjà ennuyées, mais moi pas. Je pouvais rester des heures et des heures assise là, à regarder les vagues bouger au rythme du vent. Je me sentais libre, et comme je pouvais aimer cette liberté. J'avais fait le bon choix. Tout quitter n'était pas une erreur, mais se qu'il fallait faire. Pour mon bien à moi, et tant pis si les autres étaient blessés à cause de mes actes, cela ne me regardais guère. C'était leurs problèmes. En tout cas, ma vie de maintenant me plaisait beaucoup mieux. Je n'avais plus aucune nouvelles de ma famille et encore moins de mes amis. L'autonomie, quoi de plus merveilleux.

Le soleil s’est levé et la réalité s’est installée.

« Tu sais, il m’arrive parfois de rêver que je vole. Je commence par courir très très très vite, comme si j’étais surhumaine. Et le terrain devient de plus en plus rocailleux et pentu. A la fin je cours si vite que mes pieds touchent même plus le sol. Et je flotte. C’est fantastique comme sensation. Fantastique. J’suis libre, en sécurité. Et puis je me rends compte que je suis complètement seule. Et après je me réveille. - RAIN BIRD »

Pour moi, la scène s'était passée au ralentie. Je me voyais étudier tranquillement quand brusquement, une inconnue s'était incrustée dans ma petite bulle, et dieu sait qu'elle surprise sa vue m'avait fait. Glissant du fameux rocher auquel j'étais si bien installée, seul mes livres et mes écriteaux avaient pu s'en sortir. Dans l'eau, je sentais mon corps couler, puis remontant à la surface, je pouvais entendre les rires de cette petite pimbêche.  « Je suis… Je suis vraiment, vraiment désolée de t’avoir fait peur » Et bien, j'espère qu'elle était désolée. La regardant droit dans les yeux, je lui sortis mon sourire le plus hypocrite et lui lança : « Bah, c'est pas grave, je peux me débrouiller seule. » Nageant jusqu'au rocher, j'essayais tant bien que mal de remonter, mais bon, ces foutus rochers étaient bien trop glissant. Une nouvelle fois, me regard se porta sur cette jeune femme. Tout ce que j'espérais c'était qu'elle proposerait son aide, et comme ça, à moi la petite vengeance. Je voulais pas passer pour une imbécile en étant la seule à être mouillée quand même. Impatiente de mettre mon plan diabolique à exécution, je tendis le bras, attendant de sentir sa main sur mon poignet. « Et aussi, désolée de ne pas pouvoir t’aider davantage. Mais euh… Je déteste l’eau. Par contre, je te soutiens mentalement hein. You can do it » Ça, c'était la meilleure. En plus de m'avoir fait tomber, elle ne voulait pas m'aider. Pourtant, je ne pus m’empêcher de laisser un énorme sourire paraître sur mon visage. C'était étrange, surtout que je n'étais pas le genre de fille à être aussi expressive. Je la sentais bien cette fille, elle me faisait bien marrer. De suite, la colère que j'éprouvais se dissipa et laissa place à des petits rires bien discrets. Ce n'est seulement dix minutes de galère après, que je réussis à remonter à la surface. Bah dis donc, jamais je n'aurai cru que monter sur un rocher pouvait être aussi fatigant. Bien installée, je regardais cette jeune inconnue dans les yeux et commença à exploser de rire. Moi-même je n'en connaissais pas la raison. « Je m’appelle Jaleeya… Et toi ? Je suppose que ça doit être un prénom ressemblant à… Je-tombe-dans-l'eau-quand-on-me-dit-bonjour ? » Me tendant la main, je fis de même, riant encore et encore. « Holden. Mais on me surnomme, la Reine de la maladresse ! » lui répondis-je également sur le ton de l'humour. « Ravie de faire ta connaissance Jaleeya, même si j'aurai pensé à J'-aime-faire-peur-aux-gens-en-leur-disant-bonjour-par-surprise. » C'était certain, j'adorais déjà cette Jaleeya.

Sentant mon portable vibrer, je pensais que cet appel était celui de Jaleeya, mais malheureusement, ce ne fut pas elle mon interlocutrice. « Allo, c'est toi Emma ? Pourquoi tu m'appelles ? » lui dis-je sèchement. « Oh calmes-toi l'énergumène ! » C'est vrai que sur le coup, je ne m'étais pas montrée très amicale. Surtout qu'Emma était quand même ma sœur jumelle et je n'avais pas le droit d’être aussi froide envers elle. « Excuse-moi sœurette. Tu sais très bien comment je suis avec les gens. » lui dis-je tristement. « Oui, oui, je sais. Un vrai cœur de pierre, mais c'est ce qui fait ton charme. Bref je voulais te demander ce que tu voulais manger ce soir. Parce que là, on a plus rien et faut que j'aille faire les courses. » Bizarrement, je me sentis soulagée. Moi qui croyais qu'elle voulait aborder le sujet ''Alors, pourquoi j'ai été abandonné et pas toi ?'' . D'ailleurs, j'évitais pertinemment ce thème. Je n'avais plus vraiment de nouvelles d'eux et ne voulais pas en avoir. Pourquoi ? Honnêtement, les voir me gavais. Surtout que pendant toutes ces années ils m'avaient menti. Pour moi, c'était une trahison. « Huum, fais comme tu veux. » lui répondis-je pour écourter notre conversation. « Bah là, tu m'aides pas trop. Tant pis, je verrais bien là-bas. Bon, à ce soir. » Sur-ce, elle raccrocha. On pourrait croire que je n'appréciais pas Emma, pourtant, c'était tout le contraire. Cette fille, je l'adorais autant que Jaleeya. Cependant, cela ne faisait que huit mois que nous nous connaissions. Et puis, voir une personne qui vous ressemble parfaitement physiquement, je peux vous assurer, que c'était déstabilisant. Heureusement pour moi, Emma n'était pas du genre à être successible ni rancunière donc le feeling passait très bien entre nous et puis, elle me faisait bien rire.

« Je te présente Hugo » En entendant ces mots, je ne pus m’empêcher de laisser paraître un petit sursaut. C'était Jaleeya. Heureusement que cette fois je n'étais pas tombée. « Hugo ? C'est qui Hugo ? » dis-je étonnée. Puis, en voyant sa main tendue avec un caillou rouge clair un l'intérieur, je me mis à rire bêtement Elle avait le don de me surprendre celle-là. « Puis, son cousin, Fred. » Je la regardais, ébahie par son sourire. A mon tour, je pris les deux pierres et les examinèrent. Mauvaise habitude de scientifique, à analyser matin, midi et soir, on se mettait à examiner n'importe quoi. Comme la fois dans un grand centre commercial, j’inspectais une roche, se trouvant près des ampoules. D'ailleurs, je ne mis pas longtemps avant de me rendre compte que cette fameuse roche était du plastique et une lampe. C'était certain, j'avais vraiment besoin de vacances. « Comme ça, ils pourront t’aider pour tes cours ! » « Oh, c'est trop gentil ! Dès que je regarderai ses cailloux, je penserai à toi comme ça. » lui dis-je toute souriante.