• Avez-vous des rêves ou des espoirs pour le futur ? Mon tatouage "All that we see or seem is but a dream within a dream" (Tout ce que l'on voit ou voyons n'est qu'un rêve dans un rêve) traduit très bien le fait que je n'ai aucuns rêves pour le futur. Je n'aime pas rêver de toute manière, ni même espérer quelque chose ça fait beaucoup trop souffrir.
• Dans la vie, on a des hauts et des bas. Si vous deviez nous raconter le souvenir le plus heureux de votre vie, lequel serait-il ? Quand j'avais dix ans, mon père avait pour habitude de n’emmener avec lui à ses cours de surf. Je restais sagement assise sur le sable, à regarder les jeunes surfeurs piquer des têtes dans l'eau par mégarde puis je jetais un coup d’œil à mon père qui leur donnait des conseils. Ce jour-là j'ai sut que plus tard je voulais faire comme lui. Ce n'était pas un rêve, ni même un espoir, c'était comme si mon chemin était déjà tout tracé. Mais le souvenir le plus heureux de ma vie c'est quand il m'a acheté ma propre planche de surf et m'a emmené surfer avec lui. Ce jour banal fut pourtant le plus heureux que j'ai pu vivre, car nous avions pu partager notre passion ensemble côte à côte.
• Si vous aviez l'opportunité de remonter le temps, quel événement de votre vie changeriez vous ? Peut-être que j'aurais dû montrer plus d'affection à ma mère, peut-être que j'aurais dû me comporter comme la petite fille qu'elle a toujours rêvé. Mais au lieu de ça, j'ai préféré l'amour de mon père, j'ai préféré être son idéal à lui de petite fille. Pourtant quand j'y repense, je n'éprouvais aucune tristesse quand ma mère quitta mon père, j'éprouvais plus de la haine. Certes je n'aurais pas dû me montrer aussi agressive avec elle, mais quand j'ai vu un amour brisé par un inconnu qui a réussi à conquérir le cœur de ma mère, et elle qui n'a même pas essayé de lutter contre ce nouvel amour, je n'ai pas cherché à comprendre. Voilà en fait c'est ça ! Si j'avais l'opportunité de remonter le temps, j'empêcherais ma mère de rencontrer ce nouvel homme et ainsi de voir mon père souffrir autant.

• Vivant dans une petite ville côtière, aimez-vous vous aller nager ou profiter des plages de Cooktown ? La plage c'est ma maison, enfin dans un sens. J'y passe quasiment toutes mes journées avec mon métier et j'adore ça. Combien de fois ais-je préféré dormir sur le sable plutôt que de rentrer chez moi ? Ce n'est pas parce que j'avais quelque chose à redouter dans ma maison, mais parfois je préfère largement le doux bruit des vagues qui s'écrasent contre les rochers plutôt que les conversations avec mon père. Donc oui, j'aime nager et profiter des plages de Cooktown Par contre bronzer c'est pas mon truc, j'aime pas rester là allongé à rien faire.
• Avez-vous déjà assisté à un phénomène étrange ou surnaturel ? Mmh ... mise à part les jeunes qui essayent de me faire croire qu'ils sont allergiques à l'eau ? Et bien en fait, j'ai connu pas mal de phénomènes étranges. Une fois en pleine nuit alors que je dormais sur la plage, quelqu'un (ou même quelque chose) m'a attrapé le pied. Bien fermement hein ! Bon bien sûr j'ai eu le réflexe de dégager mon pied violemment et d'essayer de me rendormir comme-ci de rien n'était étant donné qu'il faisait nuit noir. Bon sur ce coup là, j'ai l'hypothèse que c'était une mauvaise farce d'un de mes amis, même si au fond je n'y crois pas. Je crois aux esprits, aux vampires, aux zombies, aux sirènes ... Pour preuve une fois j'ai essayé d'invoquer un esprit et mon miroir s'est brisé en deux. Et pour les sirènes, c'est juste qu'une fois alors que je faisais du surf j'ai cru apercevoir une queue de poisson en train de nager paisiblement en profondeur ... Malheureusement je ne peux dire si c'est une hallucination ou non, car une vague m'est tombée dessus à ce moment là et je suis restée inconsciente deux bonnes minutes.

Les yeux embués de larmes, le visage à moitié recouvert dans ses mains, Carly Joy Bridgestone se risqua à regarder la porte d’entrée grande ouverte avant que les larmes refassent son apparition une nouvelle fois. Lorsque la jeune femme fit son apparition, Carly ne releva même pas la tête, incapable de la regarder droit dans les yeux. Comment … comment une mère pouvait-elle ainsi détruire sa famille ? Comment … ? C’était la principale question qui tournait en boucle dans l’esprit dans de la jeune fille âgée de dix-sept ans. Ce n’est que quand sa mère s’agenouilla devant elle, qu’elle interrompit le fil de ses pensées et osa enfin la regarder droit dans les yeux.« Carly … s’il te plaît.. » Avant même qu’elle ne puisse finir sa phrase, la jeune fille s’était déjà relevée brusquement, n’ayant pas envie d’entendre ses piètres excuses. « Ne me touche pas ! Pourquoi tu nous fais ça ? A moi, à Papa … Pourquoi ? » Quand elle était triste, Carly n’était pas le genre de personne à faire son pauvre petit caliméro, en effet elle laissait plus éclater sa tristesse par la colère, une violente haine parfois difficile à comprendre pour certaines personnes. Mais sa mère l’avait très bien comprise. Elle savait qu’argumenter sur ce sujet serait une cause perdue, qu’elle ne pourrait réparer la blessure infligée à sa famille malgré ses paroles. Donc au lieu de ça, elle se releva doucement, prit sa valise, se mordillant la lèvre essayant de cacher les larmes qui commençaient à venir. Carly la regarda, incapable de dire autre chose et la laissa quitter la maison, n’essayant même pas de la retenir. Elle se laissa tomber lourdement sur le canapé en regardant la voiture disparaître dans un virage, ne se préoccupant pas des larmes qui ruisselaient à grosses gouttes sur ses joues. Dans sa tête, c’était le vide total. Quand elle avait vu l’indifférence que semblait montrer sa mère face à sa tristesse, elle avait cessé de se poser le pourquoi du comment et maintenant ce n’était plus que le néant total. En fait, elle avait peur de se demander comment allait réagir son père face à cet abandon, s’il allait pleurer, s’énerver, s’effondrer de douleur, s’enfermer des jours sur lui-même. Oui, elle avait peur car elle n’était pas prête à faire des tentatives pour le consoler alors qu’elle n’y arrivait pas pour elle-même. Certes, c’était profondément égoïste, un défaut qu’elle devait certainement tenir de sa mère.
Quand Carly entendit les pas de son père, elle essaya d’un revers de la main de stopper les larmes qui ne cessaient de couler. Quand il rentra, elle se précipita à son cou comme une fillette aurait fait à son père qui rentrait du boulot. Sauf que là, elle avait fait ça pour empêcher qu’il l’attaque de questions, pour qu’il évite de lui demander où était sa mère, pourquoi elle pleurait. Carly Joy n’était pas assez forte pour lui répondre que sa mère avait préféré les quitter pour partir vivre avec un inconnu dont elle était tombée follement amoureuse il y a quelques mois de cela, et qu’elle ne reviendrait jamais.

Time to recover, time to grow, time to let go.

Un pas … deux pas. La cigarette à la main, Carly s’arrêta, les pieds enfoncés dans le sable mouillé. Elle jeta un coup d’œil à ses amis qui se dépêchaient de courir dans l’eau pour essayer de prendre la vague tant attendu. Elle sourit en les voyants avant de remettre la cigarette dans la bouche. Certains diront que c’est mauvais pour la santé de fumer, et ceux-là elle leur rigoler au nez. Avoir sa dose de nicotine, c’était vital pour elle. C’était un peu son moyen à elle d’effacer quelques souvenirs trop douloureux durant quelques minutes. Ayant commencé à l’âge de dix-sept ans, l’âge où elle avait vu sa famille se briser en mille morceaux, l’âge où elle avait décidé de prendre sa vie elle-même en main. Pourtant, bon nombre d’adolescents auraient finit n’importe comment avec tout ce qu’elle avait fait, mais pas elle. Peut-être était-ce la souffrance qu’elle pouvait partager à son père, qui avait fait qu’ils étaient aujourd’hui aussi liés et qu’elle savait où était ses limites. En parlant de limite, Carly jeta sa cigarette à terre en prenant soin de la jeter sur le bitume et non sur le sable. Ce n’était pas une question de dégrader ou non la nature, c’était juste qu’elle passait tellement de temps sur cette plage, qu’elle essayait un minimum de ne pas y mettre le souk, c’était plus plaisant de profiter d’un endroit propre. Une fois sa pause nicotine enfin achevé, elle empoigna sa planche de surf et partit rejoindre ses amis qui l’attendaient impatiemment. Une vague … deux vagues. Elle enchaîna les figures sans tomber, ce qui lui valut quelques compliments et finit par la faire rire. Elle n’avait aucuns mérites à avoir, elle n’était pas une pro du surf comme elle disait tout le temps. Pourtant, elle réussissait toujours par avoir l’admiration de certains, ne pouvant s’empêcher de la complimenter sur son métier de professeur de surf. Le surf … une passion qu’elle partageait avec son père depuis la plus tendre enfance. Professeur de surf, il lui avait appris toutes les bases, avant de la prendre sur son aile quand elle lui avait annoncé qu’elle voulait faire comme lui en grandissant. Et quand sa mère l’avait quitté, cette passion s’était encore plus amplifiée. Quand il ne faisait pas de cours, il partait rejoindre sa fille pour surfer sur les vagues. Et cela suffisait à les rendre heureux tous les deux pour toute la journée. L’eau, le surf, c’était son refuge. Combien de fois Carly était-elle partit en pleine nuit, ne pouvant dormir, se réfugier près de sa planche ? La nuit c’était forcément déconseillé, le danger était beaucoup plus risqué mais elle s’en moquait. Elle aimait bien prendre des risques, voir la lune se reflété sur l’eau et ainsi pouvoir apercevoir les profondeurs de l’eau et les mystères qu’elle pouvait regorger.

But the truth is that it hurts when you lie.

« Tu l’aimes n’est-ce pas ? » Carly qui avait jusque-là les yeux rivés sur les assiettes sales qu’elle portait, tourna la tête vers son père. « De qui est-ce que tu parles Papa ? » L’homme âgé d’une cinquantaine d’année regarda sa fille avec un sourire dessiné sur ses lèvres avant de rigoler. « Fais pas l’innocente avec moi Joy, tu vois très bien de qui je parle. Tu sais, ce jeune homme qui était sur la plage hier et que tu regardais avec les yeux qui pétillaient … Mmh si je me souviens bien il s’appelle … » La jeune fille mit les assiettes dans l’évier dans un grand bruit, le stoppant ainsi net dans ses paroles. « Arrête de dire n’importe quoi ! » Elle sentit ses joues s’en flammées et s’arrêta quelques minutes, s’appuyant contre le bord de l’évier pour éviter que son père ne la voie. Puis elle reprit sa place à table, évitant tout regard avec lui. « Bwarf, après tout tu fais ce que tu veux hein. Moi je dis juste que ça ne me dérangerait pas de l’avoir comme beau-fils, il a l’air très gentil ! » Il continua à rigoler avec son rire habituel. De ce rire que Carly aimait si bien entendre. Il représentait tellement bien sa joie de vivre, c’était tellement mieux de le voir ainsi que de le voir se morfondre en pensant à sa femme partie. Cinq ans étaient déjà passés et pourtant ils n’arrivaient pas à effacer les souvenirs présents dans son esprit. Carly avait appris à grandir, à rentrer dans la vie adulte sans la présence maternelle et prenait soin de son père étant la seule personne chère à ses yeux qui lui restait et qui ne risquait pas de partir. Elle ne put s’empêcher de le regarder, le foudroyant de ses yeux clairs quand elle le vit rire. « Je crois que tu as assez bu pour ce soir. » Son ton n’était pas autoritaire, au contraire il était doux et calme, même presque ironique car elle savait qu’elle était pris au piège. Mr. Bridgestone savait qu’il avait raison, il prenait un malin plaisir à la taquiner et elle le laissait faire même si elle se sentait assez mal à l’aise. Il tenta de répliquer en disant que de toute manière il avait raison, et que c’était elle qui avait trop bu car elle n’osait même pas s’avouer qu’elle était amoureuse. Ce qui déclencha l’hilarité chez la jeune fille avant que son père ne quitte la pièce pour aller regarder son match de football quotidien. Elle finit de nettoyer la table en essayant tant bien que mal de ne pas se remémorer ses dernières paroles, mais en vain. Au fond il avait raison, elle n’osait pas s’avouer qu’elle était tombée amoureuse. Enfin … si. Dans un sens elle le savait car elle le trouvait très charmant ce garçon mais elle ne le connaissait pas plus que ça. Alors quand elle entendait qu’il ferait un « beau-fils parfait », cela lui dérangeait un peu. Depuis que sa mère les avait quittés, Carly avait une autre définition du mot amour. Elle n’était pas du genre à rêver du prince charmant, du coup de foudre, ou encore à rougir sur le premier gars mignon qui lui adressait la parole. Et pourtant, c’était différent depuis quelques temps. Quand elle croisait son regard, elle ne pouvait s’empêcher de l’éviter, et parfois même de ressentir de la jalousie quand elle le voyait traîner un peu trop souvent à son goût avec son amie-là … Carly se tapa la main contre le front violemment, se trouvant très idiote de ressentir des choses comme ça. Elle avait d’autre chat à fouetter que savoir ou non s’il lui plaisait, si c’était réciproque. Comme … comme son cours de surf pour demain à préparer. Elle quitta la cuisine, se dépêchant de filer dans sa chambre pour éviter de repenser à ses sornettes.

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